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L’équipe de foot de Fiume veut ressusciter (courrierinternational.com 14 gen)

Le quotidien La Stampa, de Turin, raconte l'exode des Italiens après la Seconde Guerre mondiale et la renaissance d'un club qui a fait la fierté de toute une région.
 
Après avoir joué son dernier match le 14 mars, l'équipe de foot de la Fiumana fut dissoute au printemps 1943. Ses joueurs partirent au front, et, à la fin de la guerre, lorsque l'Italie fut contrainte de quitter le territoire de Fiume (aujourd'hui en Croatie), ses supporters se réfugièrent dans l'un des 109 camps disséminés dans la péninsule.

Soixante-cinq ans plus tard, une poignée d'irréductibles veulent reformer la Fiumana et reprendre l'histoire exactement là où elle s'est arrêtée, sous les bombardements. L'initiative peut paraître farfelue. C'est probablement pour cette raison qu'elle a toutes les chances de réussir. Le projet de reformation du club, avec son inscription en troisième division italienne dès la saison prochaine, repose depuis deux mois sur le bureau de Giancarlo Abete, le président de la Federcalcio [Fédération italienne de football]. Le club sera basé à Turin, et non plus à Fiume, qui, aujourd'hui, s'appelle Rijeka, même si les esprits ne pourront s'empêcher de se souvenir d'un temps où l'on jouait au stade Borgo Marina, avec d'un côté la mer et de l'autre le sommet du rocher sur lequel les jeunes venaient se percher pour assister au match sans payer. Les maillots auront la même couleur amarante, tandis que les shorts seront jaune et bleu pour reprendre les trois couleurs de la ville.

Le père de ce projet est Sergio Vatta, l'homme qui a dirigé le plus grand vivier du football italien, le Torino, d'où sont sortis Cravero, Francini et Lentini, ainsi qu'une multitude de jeunes qui se sont imposés dans le football professionnel. Vatta est né à Zara, en 1937. "Le 30 octobre 1944, ils nous ont embarqués sur un contre-torpilleur allemand qui patrouillait dans les eaux de Fiume. Nous fûmes la dernière famille à quitter la ville. Le jour suivant, les partisans de Tito débarquaient", raconte-t-il. De Fiume, ils sont arrivés à Trieste, puis à Udine, Padoue, Mantoue et enfin Turin. Une odyssée qui allait durer douze années, passées dans des camps de réfugiés.

L'intégration a pris du temps, mais elle a parfaitement réussi. Les 350 000 réfugiés sont devenus 800 000 avec leurs enfants et les enfants de leurs enfants. Plus de 40 000 vivent aujourd'hui dans le Piémont. "Et depuis que la loi a institué une journée du souvenir, le 10 février, de nombreux jeunes se sont rapprochés de leurs origines", explique Antonio Vatta, le frère de Sergio et président piémontais de l'association des exilés de Dalmatie et de Vénétie Julienne. C'est ainsi qu'est née l'envie de cristalliser ce sentiment d'appartenance autour d'une équipe mythique. Avant la guerre, la Fiumana avait manqué de peu le passage en série A.

Aujourd'hui, l'histoire reprend son cours et le projet suscite l'enthousiasme. Sur le site , certains assurent que l'équipe aura des supporters dans toute l'Italie, car les réfugiés sont disséminés un peu partout dans le pays. Vatta est convaincu que l'on peut monter une bonne équipe de troisième division avec moins de 2 millions d'euros. "Nous sommes pour un football sérieux, transparent, et c'est pour ça que nous demanderons à Abete de nous inscrire chez les professionnels, car, chez les amateurs, il y a trop d'argent qui circule sous le manteau. Nous visons les joueurs au chômage ou dont le transfert est peu coûteux, ou encore les jeunes qu'il faut lancer pour le compte de grands clubs. Le Milan et la Fiorentina nous aideront, mais aussi d'autres clubs comme le Toro et la Juve, puisque Cobolli Gigli [président de la Juventus] a lui aussi des origines istriennes." Le stade de Parco Ruffini, 8 000 places, accueillera le club. Quant à l'argent, il ne devrait pas poser de problème, puisque les industriels et les banques semblent avoir conscience de l'impact que peut avoir une équipe de ce genre.

Et puis il y a ceux qui comptent sur leurs propres racines, comme Ottavio Missoni, maire en exil de la municipalité libre de Zara. "Autrefois, les habitants de Fiume, d'Istrie et de Dalmatie étaient divisés à cause d'un esprit de clocher, mais, avec le statut de réfugiés, nous avons trouvé une douloureuse cohésion. La Fiumana sera notre sélection nationale. Et le geste de la Fédération sera un dédommagement moral, tardif mais important", conclut Antonio Vatta.
 

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